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« Tradwives » : elles lavent leur linge sale en public

Les bas-fonds des réseaux sociaux, c’est la jungle, un conglomérat de zones de non-droits où règnent appât du gain, désinformation et innovations pétées. Alors qu’on pensait le mouvement tradwife en pleine expansion, certaines anciennes adeptes prennent la parole sur Tiktok ou Instagram pour alerter sur cette forme réchauffée d’exploitation.

« Être une épouse traditionnelle est un piège ». Enitza, alias @emergingmotherhood sur Instagram, a embrassé le mode de vie tradwife il y a une décennie. Cette mère de quatre enfants raconte ses difficultés et a lancé un podcast afin d’aider d’autres femmes à sortir de relations d’emprise ou de mariage traditionnel. Et elle n’est pas la seule.

Ces dernières années, le mouvement tradwife, venu des États-Unis a déferlé sur les réseaux sociaux. La recette du succès ? Des vidéos à l’esthétique léchée, vantant un quotidien digne d’une pub des années 1950 : après une journée passée à gérer enfants, ménage et cuisine, les épouses se montrent dans des robes impeccables, prêtes à accueillir leur mari avec le sourire. Cet imaginaire, tout droit sorti de l’univers réactionnaire et conservateur de l’extrême droite, promet aux femmes une vie plus douce et simple que celle offerte par le capitalisme libéral. Sur Instagram ou TikTok, les plus connues s’appellent @EstéecWilliams, @Ballerinafarm ou @naraaziza. Mais derrière cette vie « de rêve » se cachent d’autres réalités : précarité, isolement, emprise, violences conjugales… Depuis quelques mois, d’ex-tradwives déconstruisent le vernis pastel de leurs anciennes consœurs et exposent l’envers du décor.

Car après une séparation, beaucoup se retrouvent sans diplôme ni expérience professionnelle, avec plusieurs enfants à charge. « Quand tu as été une tradwife pendant dix ans, que tu as un énorme trou dans ton CV et que tu deviens maman solo de quatre enfants…Tu n’as aucune idée par où commencer pour chercher un travail ! » résume Enitza sur son compte Instagram. Après dix ans passés sans carte bleue, sans amis, coupée du monde, la mère de famille a décidé de divorcer : « Une fois que vous aurez quitté votre mari colérique et dominateur, vous vous sentirez progressivement mieux à oublier à quoi ressemblait cette vie.  »

Beaucoup de témoignages pointent les difficultés financières traversées après la séparation. À 25 ans, @Mickay_Mouse11 s’est retrouvée seule avec quatre enfants à élever, sans diplôme ni expérience : « Je n’avais rien ». Même parcours pour @joannadahlseidofficial : « J’ai été tradwife. Et j’ai aussi été sans domicile pendant un moment. Malgré ma formation, j’ai travaillé chez Starbucks pour 9 dollars de l’heure à 31 ans. »

Morale de l’histoire : la tradwife, loin d’être une alternative au capitalisme, n’est qu’un produit marketing de plus. Ménagère docile ou girlboss épuisée se révèlent être les deux facettes d’une même pièce : celle de l’exploitation patriarcale des femmes au service de la production.

Thelma Susbielle

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CQFD n°245 (octobre 2025)

Ce numéro d’octobre revient, dans un grand dossier spécial, sur le mouvement Bloquons tout et les différentes mobilisations du mois de septembre. Reportages dans les manifestations, sur les piquets de grève, et analyses des moyens d’actions. Le sociologue Nicolas Framont et l’homme politique Olivier Besancenot nous livrent également leur vision de la lutte. Hors dossier, on débunk le discours autour de la dette française, on rencontre les soignant•es en grève de la prison des Baumettes et une journaliste-chômeuse nous raconte les dernières inventions pétées de France Travail.

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